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Le titane est un matériau qui n’a jamais disparu malgré l’hégémonie du carbone à (presque) tous les budgets. Loué pour sa durabilité, sa réparabilité, son côté élastique et son confort, sa fabrication réclame cependant une main d’œuvre mêlant expérience et précision. Alors que la production est principalement basée en Asie, les autres fabricants, français notamment sont plus que rares. Nous en dénombrons deux : Levacon dans la Marne et CMT, basé dans un petit village de Haute Savoie. Le mois de novembre nous a permis de faire le tour du propriétaire de ce dernier.
Texte : Olivier Dulaurent – Photos : 3bikes.fr, CMT
Artisanat et passion qui vont de pair
L’histoire de CMT déjà riche de 20 ans, a subi quelques transformations – et une crise sanitaire – qui ont conduit au fonctionnement actuel, toujours avec une équipe réduite et inévitablement une production limitée du fait de l’omniprésence du carbone. Ainsi, si Jean-Pierre Ramoul a racheté la marque en 2022, c’est aujourd’hui Carole qui fait la prise de commande, la relation commerciale, les études posturales ainsi que le montage des vélos, c’est Bastien qui soude (depuis une dizaine d’années en ce qui le concerne) et actuellement Robinson travaille en tant que stagiaire sur le développement d’un cadre VTT prévu pour le courant de l’année 2026.
Sitôt la porte de l’atelier franchie, la visite fleure bon l’artisanat, la minutie et la passion du travail bien fait. Pour expliquer la fabrication, Robinson et Bastien œuvrent de concert à expliquer les caractéristiques principales de CMT (pour Custom Made Titanium ou « Titane sur mesure » en français).
Mais avant de penser à la fabrication elle-même, la première étape reste bien sûr la prise de contact avec le futur utilisateur. Carole discute donc avec lui sur son projet, ses besoins, sa pratique et comment il imagine son cadre. De cet échange, découlent des aspects aussi variés que l’angle souhaité pour le sloping, le nombre de trous pour les porte-bidons, les perçages à prévoir pour accueillir d’éventuels porte bagages, le format de boitier de pédalier et bien sûr tout ce qui touche à la posturologie et à la géométrie. Il est ainsi possible de choisir un vélo qui sera au choix, plus stable ou plus maniable.

D’abord le cycliste
Sur le positionnement du cycliste, CMT travaille avec Retül et c’est donc Carole qui s’en occupe. Retül fait aujourd’hui référence en la matière, puisque le système global inclut la façon dont ce cycliste pédale réellement avec une visualisation en 3D de son coup de pédale. Les perturbations du cycle de pédalage peuvent ainsi être détectées puis corrigées en jouant sur les longueurs et les angles des différents tubes. Une fois la position du cycliste réalisée, celle-ci est transférée sur l’interface Bike Cad, un logiciel très puissant permettant de voir à l’écran le cycliste positionné, puis de « jouer » sur tous les angles et vérifier certains aspects permettant par exemple de s’assurer que le pied ne touche pas pour une géométrie et une pointure du cycliste données.

Tout en restant dans une certaine mesure et à la demande, il est possible de choisir une géométrie orientée vers la stabilité ou la maniabilité ou bien sûr d’être parfaitement neutre à ce niveau là. Par ailleurs, les derniers cadres sortis de production adaptent le plus souvent le standard T47 plutôt que BSA ou BB30, tandis que les pattes de dérailleur sont à présent majoritairement en « UDH » (pour Universal Derailleur Hanger). Ce standard, développé au départ par SRAM permet d’uniformiser les pattes de dérailleurs au lieu de se retrouver avec des milliers de références.


Les spécificités CMT
Alors que globalement les nouveautés sont rares dans le domaine du titane, CMT travaille actuellement sur une douille de direction destinée à être allégée en son milieu à l’aide d’un travail d’usinage, afin de gagner du poids, sans perdre pour autant en rigidité. Selon ses concepteurs, cela permettra de sauver plus ou moins 150 g (selon la taille du cadre), ce qui est toujours appréciable alors que le matériau conduit à des cadres plus lourds que ceux en carbone : prévoir au minimum 1300 g pour le cadre seul, ainsi sans compter le gain prochain sur la douille de direction.
Au niveau du titane employé, CMT fait confiance à la qualité Grade 9 (ou Ti 3Al-2.5V pour les intimes), autrement dit un matériau contenant 3% d’aluminium et 3,5% de Vanadium, c’est à dire les valeurs les plus employées dans l’industrie du cycle. La vue d’un cadre sortant de l’atelier indique que les tubes – en provenance de l’industrie et d’épaisseur constante en 0,89 mm – offre cinq diamètres différents allant de 17 mm pour les haubans à 42 mm pour le tube diagonal et même 50 mm pour la douille. Selon CMT, cette manière de travailler garantit d’une part une résistance mécanique homogène quelle que soit la production et d’autre part l’obtention d’une certification ISO sur tous les tubes. A l’inverse, l’autre fabricant Français Le Vacon se fournit par exemple chez Dedaccia ou Reynolds avec du titane spécifique pour le cycle et obtient des épaisseurs différenciées sur les tubes, ce qui amène une légère réduction de poids.

Une gamme diversifiée
CMT constate que clientèle a changé en 10 ans avec notamment un sensible rajeunissement coïncidant avec l’apparition du Gravel et l’engouement pour le Bike Packing ainsi que l’Ultra Distance. Pour ces disciplines, le titane apporte beaucoup d’avantages : solidité, aspect neuf plus longtemps (pas de peinture), confort, sur mesure et réparabilité importante (car il est toujours possible de dessouder puis ressouder un tube qui aurait subi une contrainte importante comme sur une chute). De façon assez étonnante et alors que les cadres à patins gardent leurs aficionados, la marque n’a pas de demande pour ce format.
Un autre avantage constaté et alors que le prix des cadres carbone haut de gamme a explosé, celui du titane est resté à peu près constant sur les 20 dernières années, ce qui revient à dire qu’ils sont moins chers du fait de l’inflation sur cette période.
Ainsi, aujourd’hui il faut compter 3290 € pour le kit cadre, comprenant en plus du cadre seul : vis de porte bidon, vis de porte bagages (si celui est évidemment prévu), jeu de direction, collier de selle, fourche, les deux axes de roues, la patte UDH. Ce tarif est valable pour tous les kit cadres, à l’exception du modèle MX dont la fourche (télescopique dans le cas présent) est différente. Ce tarif conduit à obtenir un vélo complet avec un groupe Shimano 105 électrique à disque et des roues de moyenne gamme autour de 6000 €. De toutes façons, le configurateur présent sur le site permet de se faire une idée exacte du prix de sa propre configuration.
Enfin, le délai d’attente une fois le bon de commande signé est aux alentours de trois mois seulement, avec forcément une légère variabilité en fonction de la saison. Mais pour des cadres sur mesure, ce « détail » sera certainement accueilli avec plaisir par les amateurs, qui sont environ une centaine par année à se manifester.

Pour un vélo complet avec un groupe Shimano Ultegra à disque, des roues « maison » carbone en 35 mm de hauteur (1350 g la paire), un combo Deda Alanera, il faut compter 7740 €, une somme moins élevée que la plupart des vélos équivalents en carbone et de grande série qui n’ont ainsi pas « d’histoire », à l’inverse d’un cadre CMT qui place l’humain et les échanges au cœur du projet. De plus, de nombreux paramètres peuvent être personnalisés au moment du montage du vélo complet comme la largeur du cintre, la longueur de potence, le recul de tige de selle, la largeur de selle, la taille des manivelles, la taille des disques, les combinaisons de développement, la largeur des pneumatiques, le montage tubeless ou chambre à air, le montage cockpit full intégré ou semi intégré, etc.
Contact : cadres CMT
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