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On l’avait croisé mille fois à l’écran ces dernières années, sans jamais l’avoir vraiment retrouvé en chair et en os. Sa voix, elle, ne nous avait jamais quittés : posée, claire, presque clinique par instants, capable d’attraper une course au vol et d’en décortiquer l’invisible. Fritsch. Un nom qui claque comme un mouvement de balancier, presque mécanique. Pourtant, lorsqu’on le retrouve en face-à-face pour 3bikes, il n’y a rien de mécanique en lui : seulement quelqu’un d’extrêmement présent, humble dans l’écoute, exigeant dans la pensée, soucieux d’aller au bout des idées sans jamais forcer le trait.
Par Jeff Tatard – Photos : Nicolas Fritsch
Le décor est simple : une table, deux cafés.
Le monde pourrait s’effacer autour ; rien ne compterait que le fil de la conversation.
On vient pour tracer un portrait. Pas un inventaire. Un portrait : celui d’un homme qui a vécu plusieurs vies dans le même corps, et qui garde sur les lèvres cette manière un peu douce de regarder l’effort comme un langage.
Avant le vélo, les foulées
Avant les braquets et les pelotons, il y a eu la foulée. La course à pied…
Il se souvient très précisément du moment où il a compris qu’il aimait ça. Un cross, gagné. Petit. « Ce n’est pas la victoire qui compte ; c’est ce qui s’ouvre derrière ». La sensation d’un corps qui se dépasse. D’un souffle qui porte plus loin. D’un instant où l’ « on se sent relié à quelque chose de plus grand que soi ».
La scène n’a rien de spectaculaire, mais elle est fondatrice. Une première pierre silencieuse.
D’ailleurs, c’est par là qu’il commence lorsqu’on l’interroge sur ses débuts. Il pourrait évoquer tout de suite le vélo, la famille cycliste. Mais non. Il raconte la course. Comme si tout le reste n’était venu qu’en second, une ramification logique d’un premier amour.
Pourquoi la course à pied, dans une famille de vélo ? Peut-être parce que son père cycliste voulait le préparer sans le brûler nous nous étions dit… Peut-être parce qu’il fallait apprendre d’abord l’effort, l’engagement, puis seulement la technique.
Dans ses mots, cela apparaît comme une corrélation plutôt qu’une contradiction.
« On ne devient pas coureur cycliste par hasard » ; on le devient parce qu’on a déjà appris à aimer l’effort.
Et puis, un jour, le vélo prend la place. Une première course. Puis une première victoire, puis l’US Créteil. Le récit s’accélère…
L’appel
Chez lui, l’étincelle ne vient pas d’une idole inaccessible, mais d’une image restée gravée.
Été 1989. Dans le salon de ses grands-parents, quelque part en Italie, il suit à la télévision le duel insensé entre Fignon et LeMond, ce contre-la-montre qui renverse le Tour pour huit petites secondes. La pièce est calme, l’écran crépite, et soudain tout bascule : ce jour-là, quelque chose s’ancre. Une vision. Un vertige. Un déclic.
Ce qu’il retient, ce n’est pas tant la figure du héros, mais la possibilité : « Tu peux y être! ».
Le vélo s’impose, désormais. Non pas comme une révélation, mais comme une évidence qui s’épaissit. Et le temps s’accélère.
Passer pro, saisir la marche
« Le jour où l’on devient stagiaire, on change d’air. Ce n’est plus du tout la même altitude ».
Nous sommes en 1997. Année fondatrice pour le cyclisme français : naissance de Cofidis et de la FDJ. Un nouveau souffle. Une jeunesse de projets et d’ambitions.
Nicolas est l’un des deux plus jeunes stagiaires du peloton, aux côtés de Loïc Lamouller, passé par Aubervilliers. Lui arrive directement chez la Française des Jeux.
Notre premier souvenir de Fritsch chez les professionnels. Une course connue et réputée en Bretagne, la mi-août bretonne. Il est sur la startlist, il n’a pas beaucoup plus de 18ans et on peine à réaliser l’échelle du saut qu’il vient de faire. Finalement, il ne termine pas la course. Emmanuel Magnien de l’équipe Festina gagne ce jour-là.
Ce n’est pas grave. Ce qui compte, ce n’est pas la course ; c’est la porte d’entrée.
| Il découvre l’environnement professionnel… « Pas de grandes explications. Pas de pédagogie formalisée. Juste une immersion ». |
Il évoque ses années FDJ avec lucidité. Pas de rancœur, mais un constat : « personne ne t’expliquait vraiment la réalité du cyclisme de l’époque ».
Dans un milieu marqué par les affaires de dopage, où le peloton tournait parfois à deux, voire trois vitesses, les jeunes comme lui, débarqués sans repères, se retrouvaient face à un monde dont on ne leur donnait pas les clés. « On ne te disait pas clairement ce que tu pouvais espérer, ni pourquoi tu ne gagnerais pas. »
Ce manque de parole, plus que la dureté du sport, est ce qu’il retient : « on ne préparait pas les néophytes à comprendre le système dans lequel ils entraient ».
Pas de pédagogie, pas de mise en perspective, pas d’explication des limites réelles de la performance à l’époque. Autrement dit : « il y avait une structure, mais on ne disait pas aux jeunes ce qu’il y avait vraiment derrière ». On entrait dans le haut niveau sans explication, sans contexte, sans mode d’emploi.
Résultat : certains comprenaient vite les règles non écrites du milieu… et les autres restaient sur le bord de la route.
Il progresse vite malgré tout aussi parce qu’il s’agit d’un véritable talent… Tour du Finistère. Tour de Suisse. Il brille. Pas en force brute : par subtilité. Par intelligence. Par précision.
Il est méticuleux. Il cherche, mesure, décortique. Il conceptualise avant de répéter. Sa force n’est pas seulement physique. Elle est cognitive. Il observe, non seulement le monde autour, mais son propre corps. Il se demande : « Que se passe-t-il quand je m’entraîne ? Comment puis-je l’améliorer ? Quel est l’effet réel de ce que je fais ? »
Dans sa manière de raconter, on comprend que la performance n’a jamais été une fin en soi. C’était un processus. Un dialogue avec soi.
Un jeu d’hypothèses et de preuves.
De ses années FDJ (la Française des Jeux, comme on l’appelait à l’époque) comparées à son passage en Espagne chez Saunier Duval, il retient aussi une différence culturelle nette entre l’organisation française et certaines structures étrangères.
« Chez les étrangers, il y a une forme d’appartenance plus forte, plus immédiate », dit-il. Pas quelque chose de théorisé, mais une évidence ressentie : une équipe où l’engagement dépasse la simple fiche de paie.
Il raconte par exemple qu’un mécanicien aurait été prêt, une heure avant le départ, à démonter puis remonter son vélo si nécessaire, sans discuter. Pas parce que c’était son travail ; parce que c’était leurcause commune.
Il ne critique pas la France ni les structures hexagonales, mais il reconnaît qu’à l’étranger, chez Saunier Duval notamment, régnait une atmosphère qui engageait davantage, presque organiquement.
Lui observe. Il compare. Il apprend.
Même lorsqu’éclate le cyclone médiatique de l’affaire Riccò, “le Cobra”, énième démonstration d’un cyclisme fracturé à plusieurs vitesses. Il aurait pu se perdre dans cette tourmente. Il traverse.
S’il devait revivre une journée de coureur, il ne choisirait pas forcément une victoire. Il choisirait un moment de grâce. Un de ces instants rarissimes où tout s’aligne : les jambes, la tête, le contexte, où le corps semble se détacher du monde, comme si la route s’ouvrait pour vous seul.
Il revoit Paris–Corrèze. Ce jour-là, il s’échappe. Personne ne revient. L’écart grimpe, grimpe encore, jusqu’à huit minutes sur un peloton lancé, mené par les plus grands leaders de l’époque.
Un sourire se dessine lorsqu’il raconte : « Ils étaient tous devant, à tourner pour rentrer… mais ils ne me reprenaient pas. »
À l’arrivée, certains, incrédules, lui demandent : « Est-ce que tu t’es fait aider par les motos ? » Il éclate de rire en le racontant. Non. Pas du tout. Juste un jour en état de grâce, où l’on touche l’intouchable.
Et puis il y a une autre image, qu’il garde comme un bijou dans un écrin.
Le Mont Ventoux. À côté d’Armstrong. Pour beaucoup, un fantasme inaccessible ; pour lui, un souvenir physique, au point qu’il se dit ce jour-là : « Même si ma carrière s’arrêtait demain, au moins… j’aurai vécu ça. »
Il termine 9ᵉ de l’étape. Et pourtant, ce n’est pas le classement qui compte. C’est la sensation, celle d’avoir habité pleinement sa place, ne serait-ce qu’un temps, sur ces pentes lunaires où la légende se mesure au souffle.
Deux images, deux éclats : Paris–Corrèze et le Ventoux. Deux instants suspendus, où la vie d’un coureur se résume à l’essentiel : être là, exactement là, dans la trajectoire qui est la sienne.
La fin, ou plutôt : l’autre début
La carrière professionnelle s’achève en 2008. Et très vite surgit la question à laquelle aucun sportif n’échappe : « Et maintenant ? »
Libération, vertige, renaissance ? Sans doute un peu des trois à la fois.
Il quitte le circuit pro, mais pas le sport. Chez lui, l’effort n’est pas une parenthèse ; c’est une manière d’habiter le monde.
Alors il bascule vers le triathlon. Pourquoi ?
Parce qu’il lui fallait un ailleurs. Un nouveau langage. Un défi sans repères, enveloppé de brouillard, là où plus personne ne l’attend.
Il se lance. D’abord Nice, une première fois, pour apprendre, sentir, comprendre. Puis dix ans plus tard, il y revient. Et cette fois, tout se noue : une qualification insensée pour Hawaï.
À Nice, il gagne toute catégorie confondue, et surtout, il se classe juste derrière les quinze professionnels, comme un rappel discret que l’ancien coureur est toujours là, bien vivant, transformé, mais intact dans sa capacité à se dépasser.
Il raconte cette journée sans emphase. Pas de grandiloquence, pas de mythologie. Seulement des faits, des sensations : « le corps qui trace sa route, le souffle qui dit oui, l’endurance qui s’élargit ».
Quelques mois plus tôt, en avril 2018, il avait pourtant déjà donné le ton. Un week-end d’entraînement, aussi insensé qu’évident pour lui :
- Samedi : 180 km de vélo,
sur un Van Rysel que Decathlon venait tout juste de lui remettre la veille.
- Dimanche matin : marathon de Paris en 2 h 50, exactement l’allure calibrée pour aller gagner, deux mois plus tard, son ticket pour Hawaï.
Nous y étions, 3bikes s’était déjà glissé dans ce morceau de préparation, comme si nous pressentions qu’il se passait quelque chose.
Ce n’était pas seulement de l’entraînement. C’était une transition. Une mue. Le moment où un homme comprend que la fin d’une histoire n’est jamais qu’un seuil vers une autre.
On a l’impression d’un récit illogique. Mais il faut l’entendre : chez lui, l’endurance n’est pas un exercice ; c’est une respiration.
À Hawaï, la chaleur n’est pas ce qui le marque le plus. C’est l’humidité. Ce climat que le corps absorbe comme un poids supplémentaire, invisible.
Il se met en mode robot. Il avance. Toujours.
Avec cette constitution solide, cette capacité à cicatriser, mentalement et physiquement.
Ce qu’il trouve dans le triathlon ? Une forme de totalité. Trois disciplines qui fracturent l’effort en plusieurs variations. Une façon de se prouver qu’on peut encore apprendre.
Et la simplicité fondamentale de l’homme réapparaît. En parlant des grands triathlètes, il lâche cette phrase, presque comme un constat : « Dans chacune des trois disciplines, ils auraient un niveau largement international. »
Pas de fausse modestie, pas d’exagération.
Juste du respect. « Les grands sont grands. »
Il pense notamment à Kristian Blummenfelt, champion olympique de triathlon, capable d’enchaîner 180kms de vélo à 45 km/h de moyenne, puis un marathon en 2 h 30, comme si les limites humaines n’avaient jamais existé.
À l’évocation de son nom, Nicolas sourit, un sourire mêlé d’admiration et d’incrédulité : « J’admire ces gars-là. Ce qu’ils font… c’est irréel. Il faut le voir pour le croire. »
Pour lui, ce qui impressionne n’est pas seulement la performance brute, mais cette constance mentale, cette façon de rester présent dans l’effort, minute après minute, là où le corps voudrait s’effondrer.
Il ne voit pas qu’un chronomètre. Il voit un récit. Une architecture intérieure. Un engagement total.
Chez Nicolas, l’admiration n’est jamais naïve : elle est lucide, sensible, habitée. Elle dit quelque chose de plus profond : « que la grandeur sportive n’est pas seulement dans la victoire, mais dans ce courage tranquille qui consiste à se tenir debout au bout du bout de soi ».
Fitnext, l’autre école
Dans son parcours, il se certifie, se diplôme, passe ses concours, apprend le coaching, la transmission mais aussi la physiologie, la biologie, la biochimie, etc et tout ça auprès de pontes et puis il y a aussi Fitnext… il rejoint Erwann Menthéour en 2016. Là encore, il ne cherche pas à magnifier. Il dit ce qu’il y a à dire : « Ce n’était pas que du bon. Mais j’ai appris. Sur le corps. L’esprit. L’alimentation. Le rapport aux autres. »
Il prend. Il retient. Il absorbe. Toujours apprendre. Encore…
Devenir la voix, l’entrée dans les médias
Puis vient une autre transition : l’entrée dans les médias, le rôle de consultant. Pour la plupart des passionnés de vélo, c’est là qu’il devient familier. Sa voix sur Eurosport, calme et précise, est de celles qu’on reconnaît aussitôt, comme un compagnon de route capable d’éclairer un peloton éclaté ou de révéler ce qui ne se voit pas à l’écran.
Ce passage vers le micro s’opère sans fracas, presque naturellement. Il s’y installe comme dans une pièce déjà connue. Ce qu’il aime ? L’analyse, mais pas celle faite à froid, une fois la course terminée. Ce qui l’anime, c’est l’analyse en direct, à chaud, quand le souffle de la course est encore présent, que rien n’est écrit.
« Là, tu peux te tromper. Ce n’est pas grave. Ce qui compte, c’est d’être là. D’être juste dans l’intention. » Il décrit ce travail comme un exercice d’équilibriste : trop d’affect, tu t’égares ; trop de neutralité, tu perds la vie. Il faut naviguer entre passion, précision et pédagogie, être à la fois dans la course et juste au-dessus d’elle.
Ce qui le rend unique, c’est qu’il s’autorise à ne pas savoir. « Je ne sais pas. » Trois mots rares, précieux, qui maintiennent un espace d’honnêteté. Pour lui, une bonne analyse n’est pas celle qui a raison, mais celle qui donne à voir : qui révèle l’invisible, qui ouvre l’horizon du téléspectateur, qui lui permet de sentir autrement la course.
Le podcasteur : laisser respirer la parole
Late Cycling. Puis Bistrot Vélo.
Dans ces formats, il explore un autre rapport à la parole. Plus libre. Plus humain. Plus sensible.
Il cherche ce qu’on ne trouve pas sur les antennes. Le “off”. Le non-dit. Les zones grises.
« Là, on ne commente pas : on écoute. On laisse vivre. »
Ce qu’il veut créer ? Un endroit où l’on dépose quelque chose. Pas seulement de l’information, mais une part de soi.
« Il y a un cadre. Oui ! » Parce qu’il faut bien une boussole. Mais « 80 % du temps, c’est l’échange qui guide. 20 %, c’est l’improvisation ».
Il le dit comme une évidence : « Tu ne peux pas résumer une heure de conversation en deux minutes de chronique si tu n’as pas déjà fait le travail avant. » Ce travail de condensation, trier, filtrer, hiérarchiser, est une compétence qui s’acquiert, patiemment.
Chez lui, ce processus ne se fait pas assis derrière un bureau. Son véritable laboratoire, c’est quand il court. C’est là que les idées émergent, s’assemblent, se frottent les unes aux autres. La mise en forme, elle, vient plus tard, souvent dans la voiture qui l’emmène vers les studios d’Eurosport. La route devient alors le dernier sas avant l’antenne : un endroit où les pensées se posent et prennent leur cohérence.
Ses invités le surprennent. Toujours. Mais quand il évoque celui qui l’a le plus surpris il parle de Paul Seixas « un coureur brillant, il le décrit ainsi : Il n’est pas seulement fort, il est très intelligent. Et la puissance n’a de sens que si elle est pensée ».
Le cyclisme moderne, entre lucidité et tension
Sa vision du cyclisme actuel n’est pas nostalgique. Elle est lucide. Nuancée.
Plus scientifique ? Oui. Plus débridé ? Peut-être. Plus court-termiste ? Certainement. Il se surprend à n’avoir jamais autant aimé le vélo pour autant. Peut-être parce que c’est devenu ultra télévisuel. Ce qui l’inquiète néanmoins : « la disparition de certaines équipes amateures, ces réservoirs de talents, ces pépinières essentielles. » Une hémorragie silencieuse. Le risque : « que les futurs champions soient captés plus tôt, mais plus brutalement ». « On demande à des cadets de vivre comme des pros. Trois entraînements par semaine ne suffisent plus pour “être compétitif”. »
Le vélo change. Mais l’humain ? Lui, reste le même. Et c’est là que se situe le danger.
Ce que le sport lui a appris
Le sport est une école de soi. Il vous place devant vous-même. Il vous force à répondre à des questions que vous n’auriez jamais posées.
Quand on lui demande ce qu’il a appris, il reste un long instant silencieux.
Puis… « Le sport m’a appris à me connaître. Ce n’est pas une réponse. C’est une évidence. »
Il parle d’équilibre. D’humilité. D’adaptation.
Sa plus grande fierté n’est pas une victoire. Pas un classement. Pas un trophée. Non. C’est une transition. Il reste pudique à ce moment et on ne vous confiera pas l’intimité qu’il nous a partagé en off, mais il parle de ses enfants, ses filles, et de l’apprentissage qu’il tente de leur transmettre par le biais du sport.
Avoir quitté le vélo pro, avoir trouvé une autre voie, avoir construit une nouvelle identité, tout cela sans amertume, sans aigreur. Avec élégance.
Alors, le vélo n’est pas sa vie. C’est juste l’un de ses langages.
Philosophie de vie
Lorsqu’on lui demande de résumer sa philosophie de vie en une phrase, il sourit. Il cherche, non pas une formule, mais une vérité. Et ce qu’il propose sonne comme une promesse silencieuse : « Faire de son mieux, mais toujours rester curieux. »
Simple. Pur. Vrai.
Concluons avec une grâce discrète et de la profondeur
Nicolas Fritsch n’est pas un héros de légendaire cyclisme. Il n’a pas bâti sa vie sur un palmarès. Il n’a pas cherché à devenir une figure à célébrer. Et pourtant. Il y a chez lui cette matière rare : la capacité de se réinventer, de se déplacer, de continuer à apprendre, sans perdre son centre.
La course à pied de l’enfance, le vélo pro, le triathlon, les médias, le podcast… Chaque chapitre n’efface pas le précédent. Ils s’additionnent. Ils construisent. Il ne s’est jamais défini par ce qu’il faisait, mais par la manière dont il le vivait. Précis. Réfléchi. Curieux. Humain.
Dans ses mots, on retrouve une vérité simple : « le sport n’est pas seulement ce que tu accomplis, mais ce que tu deviens grâce à lui ». Son parcours est moins une ligne droite qu’une série d’ajustements. Une danse avec la vie.
Ce qui frappe, c’est la cohérence silencieuse de tout cela. Comme si, malgré les virages, il avait toujours été exactement où il devait être. Il partage son regard sans chercher à convaincre. Il raconte sans chercher à impressionner. Il analyse pour révéler, pas pour briller. Et peut-être est-ce cela, le plus beau dans cette histoire : L’intelligence n’est jamais chez lui une arme, mais un outil au service de la compréhension.
La force n’est jamais domination, mais exploration. Le vélo, le triathlon, la parole, l’écoute : toutes ces disciplines disent la même chose. Que la vie est un mouvement. Que le sens n’est pas donné. Qu’il se construit.
Et que, si l’on reste curieux, si l’on demeure en éveil, si l’on accepte de recommencer, alors rien ne se perd : tout se transforme. Nicolas Fritsch est de ceux qui avancent sans bruit, avec cette classe tranquille qui ne cherche pas à se montrer, mais à transmettre.
Sa voix sur Eurosport, ses conversations au Bistrot Vélo, son regard sur le monde, tout concourt à dessiner le même fil : Comprendre, et faire comprendre. Voir, et faire voir. Apprendre, et transmettre.
Alors, si l’on devait retenir une chose de ce portrait, ce serait peut-être ceci : Dans un monde qui exige des certitudes, il préfère la nuance. Dans un milieu qui célèbre les sommets, il honore les passages. Dans une époque obsédée par le court terme, il cultive la profondeur. Parce que le sport n’est pas seulement une affaire de watts, mais une affaire d’âme. Parce qu’un athlète n’est pas seulement un corps, mais un être. Et parce que la plus belle victoire, celle que l’on oublie souvent de célébrer, est peut-être simplement de devenir soi.
=> Si vous voulez écouter sa voix, prenez un moment pour découvrir cet échange dans Bistrot Vélo avec Paul Seixas : Bistrot Vélo avec Paul Seixas
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