Titia Ryo, le souffle breton qui inspire le Tour

« Grandiose. Émotion. Apprentissage. » Trois mots. Trois éclats simples, mais lourds de sens. Trois mots qui condensent l’intensité d’un premier Tour de France Femmes vécu en pleine lumière, au milieu des cris du public et du tumulte du peloton. Trois mots comme un sceau gravé dans le cœur d’une cycliste de 20 ans, déjà capable d’émerveiller par sa fraîcheur, son authenticité et sa force intérieure. Pour 3bikes, nous avons pris la roue de Titia Ryo, cette jeune Bretonne qui trace sa route avec passion et humilité. Voici le récit d’une championne en devenir, qui n’a pas fini de nous surprendre.

Par Jeff Tatard – Photos : DR

Le choc des émotions à Vannes

Tout commence à Vannes, ce matin où le soleil breton éclaire les pavés, les drapeaux et les sourires. Sur le podium de présentation des équipes, Titia prend de la hauteur. Elle regarde la foule compacte, les yeux écarquillés. À ses côtés, Maurenne, sa copine, lui glisse une phrase qui restera : « Là, on va pleurer tellement c’est incroyable. »

Vannes en liesse, la Bretagne au cœur : pour son premier Tour, Titia Ryo découvre un public entièrement acquis à sa cause, entre larmes, frissons et fierté bretonne.

Et ce n’est pas une exagération. Car pour Titia, ce moment est un double vertige : l’appréhension d’un premier Tour de France, et la jubilation de découvrir ce que le vélo peut avoir de plus grandiose. La Bretagne, sa Bretagne, lui offre une entrée fracassante dans un univers qu’elle a rêvé sans jamais oser se l’avouer.

La suite se joue sur la Côte de Cadoudal. Les mots de Titia claquent comme une photo prise en plein effort : « Lors de mon premier passage dans cette bosse, j’ai cherché tous les visages que je connaissais pour me donner un maximum d’énergie. »

Nous y sommes repassé pour 3bikes quelques semaines plus tard… Dans l’avant-dernier virage de la mythique côte de Cadoudal, son nom est encore inscrit sur l’asphalte. Et quand on ferme les yeux, on entend toujours crépiter la route et la clameur du public scandant “Titia” comme un refrain enivrant.

Son nom peint sur l’asphalte. Des cris venus de visages connus depuis toujours. Et cette vague immense qui pousse plus fort que n’importe quelle gorgée de gel énergétique. Le vélo, ici, n’est plus seulement un sport. C’est une communion.

Les racines, l’enfance, la famille

Derrière cette intensité, il y a les racines. Et pour Titia, elles sentent les pâtes de fruits. Oui, car son tout premier souvenir de vélo, c’est là : « Quand on mangeait les pâtes de fruits avec mon frère dès que mon père avait fini sa course. »

Le cyclisme est une affaire de famille, un fil rouge qui relie chaque membre du clan Ryo. Un père passionné, transmetteur infatigable ; une mère confidente, pilier invisible ; un frère force tranquille, rassurant dans son calme. « Je ne remercierai jamais assez mes parents et mon frère pour ce qu’ils font pour moi. » Chez les Ryo, pas besoin de se répéter mille fois que « le vélo sera ta vie ». Les choses viennent doucement, comme une évidence tissée au fil des kilomètres, des dossards épinglés et des routes avalées.

L’ascension vers le haut niveau

Il n’y a pas eu de foudre tombée du ciel, pas de course magique qui aurait d’un coup ouvert toutes les portes. L’histoire de Titia s’est construite par étapes, par paliers. Son passage chez les Breizh Ladies, ses sélections en équipe de France, son titre de championne de France junior en 2022… Tout cela a forgé son chemin.

La première fois que nous avons croisé Titia pour 3bikes, c’était il y a trois ans. À seulement 17 ans, maillot de championne de France junior sur les épaules, elle nous avait déjà séduits par sa fraîcheur et sa personnalité. On devinait alors un avenir lumineux…

« L’arrivée au sein de la Breizh Ladies, avec des courses à plus haut niveau, et les courses en équipe de France m’ont fait grandement évoluer. »

Le contrat pro avec Arkéa-B&B Hotels Women n’est pas tombé comme une surprise. C’était le fruit d’une progression, d’un travail acharné, et d’un amour jamais forcé pour ce sport exigeant.

La joie de partager

À 20 ans, Titia vit dans un monde où chaque performance se double d’un partage en direct sur les réseaux. Beaucoup se demandent si cette fraîcheur numérique est calculée. Chez elle, la réponse fuse, claire et sincère : « Je pense que je fais au feeling. J’aime juste partager quelques moments. »

Et ça marche. Parce que c’est naturel, sans filtre. Parce que ça donne aux fans l’impression de suivre une amie, pas une athlète intouchable. Et parce qu’elle sait que ces soutiens-là comptent aussi quand la pente se fait rude : « Sentir qu’on est soutenu aide forcément à se dépasser. »

Un selfie pris à la volée, aussitôt partagé en story : chez Titia, la spontanéité prime sur la mise en scène. Une fraîcheur numérique qui séduit ses fans et qui reflète bien son authenticité.

Arkéa-B&B Hotels, une famille élargie

L’équipe, pour Titia, ce n’est pas qu’un maillot. C’est une tribu. Elle en parle avec chaleur, presque tendresse : « Les Grands Tours, comme la Vuelta et le Tour de France cette année, ont été des moments marquants qui nous unissent tous, avec les filles et le staff. »

Une équipe, une famille.

Dans cette ambiance, elle apprend chaque jour, non pas à recopier les plus expérimentées, mais à trouver sa propre voie. « Chaque fille est différente et apporte quelque chose de différent, et c’est ça qui est bien. Qu’il ne faut jamais lâcher : la défaite d’un jour peut devenir une victoire pour après. » Voilà la philosophie qui lui permet d’avancer, sans pression excessive, mais avec une lucidité rare pour son âge.

Le Tour de France Femmes : douleur et magie

Il y a l’étape 2, chez elle, à Quimper. Une épreuve terrible physiquement. Et pourtant… « J’ai beaucoup souffert physiquement mais avec toute ma famille et mes amis réunis sur cet événement, c’était magique. » Voilà l’essence du sport : la douleur transcendée par l’émotion, la souffrance magnifiée par l’amour des siens.

À Quimper, son clan au grand complet avait fait le déplacement. Famille, amis, proches : une marée de visages familiers pour l’aider à transformer la douleur en magie

Le Tour, pour Titia, c’est un tremplin. Un baptême du feu. Un choc d’images et de sensations qui forgent une identité nouvelle. « Grandiose. Émotion. Apprentissage. » Ces trois mots résonnent comme une promesse. La promesse que ce premier Tour n’est qu’un début, qu’il ouvre une route immense, faite de rêves et de défis.

Et maintenant ?

Titia n’a pas besoin de crier ses ambitions. Elle avance, étape après étape. Le vélo n’a jamais été une révélation soudaine pour elle, mais une lente maturation. Et c’est sans doute ce qui la rend si forte : elle n’est pas prisonnière d’un destin, elle en est l’artisane.

Le public breton l’a déjà adoptée comme une héroïne locale. Le peloton l’a identifiée comme une combattante. Et ses proches savent qu’au-delà des résultats, Titia incarne quelque chose de rare : une authenticité brute, une joie intacte, une énergie contagieuse.

Alors, quand on lui demande où elle veut aller, elle sourit, elle rêve, et elle repart. Parce que le plus beau reste à écrire.

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Jean-François Tatard

- 44 ans - Athlète multidisciplinaire, coach en vente et consultant sportif. Collaborateur à des sites spécialisés depuis 10 ans. Son histoire sportive commence quasiment aussi vite qu’il apprend à marcher. Le vélo et la course à pied sont vite devenus ses sujets de prédilection. Il y obtient des résultats de niveau national dans chacune de ces deux disciplines.

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