Humeur : faut-il laisser rouler les VTT électriques en forêt ?

Le VTT à assistance électrique est parfois montré du doigt par les puristes pour des raisons d’éthique, de déviance ou de philosophie. Mais dans cet article nous avons voulu vérifier un autre aspect qui nous inquiète. En effet, s’ils sont les nouvelles stars de l’univers du vélo pour leur impact neutre sur l’environnement et aussi parce qu’ils sont pensés pour faciliter le moyen d’entretenir sa forme à moindre effort, les VTT électriques ne sont pas sans danger. On tente de s’expliquer… 

Par Jean-François TATARD – Photos : depositphotos.com / DR

Le VTT à assistance électrique se développe fortement depuis quelques années et on en voit de plus en plus dans les forêts. Les VTT à assistance électrique ont effectivement tout pour séduire. Et leurs nombreux attraits tant pour la commodité de déplacement que pour la santé ou les loisirs font de ce deux roues un moyen de transport très apprécié.

Humeur : faut-il laisser rouler les VTT électriques en forêt ?
Le VTT électrique connait un grand succès, car il rend accessibles des parcours très escarpés.

La demande est de plus en plus importante mais les adeptes sont des utilisateurs de tout âge. Des enfants, des adultes et des séniors, voire des très seniors ont enjambé ce nouveau type de vélo. Et parfois, sans bien déterminer les risques liés aux accidents et au fait que les réflexes sont souvent en décalage cognitivement avec la situation.

Cet article est d’ailleurs né d’un accident dont nous avons récemment été victime en Gravel musculaire ou à propulsion humaine (vous l’appelez comme vous voudrez) dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye en rentrant en collision en face à face avec un septuagénaire qui roulait justement sur un VTTAE. La puissance nominale du moteur électrique installé sur ce type de deux roues atteint les 250 watts lorsqu’il est dans les règles. Et parfois, certains les débrident et roulent à la vitesse d’une mobylette. Dans la plupart des cas, l’assistance offerte par le biais du moteur permet de rouler à plus de 25 km/h sauf que certains endroit ne s’y prêtent pas. Et même si l’assistance au pédalage n’est effectivement que lorsque le cycliste pédale, il faut tenir compte du fait que les pratiquants débutants sur ce type de vélo devraient impérativement se référer aux différents traçages au sol et y aller à tâton dans les singles. Et encore, on n’ouvre pas dans cet article le débat de l’interdiction des véhicules motorisés dans la plupart des forêts. Car en effet, un VTTAE est-il un véhicule à moteur ? 

Humeur : faut-il laisser rouler les VTT électriques en forêt ?
La cohabitation en forêt est parfois difficile entre des utilisateurs du VTTAE peu expérimentés ou peu respectueux avec les cyclistes en vélo « musculaire ».

Pour aller au-delà de notre réflexion, même s’il faut admettre que ce type de bicyclette est un bon moyen de mettre ou remettre en selle un public ne pratiquant pas ou plus d’activité sportive, l’analyse que nous avons faite c’est que beaucoup de gens que nous avons croisés dans les chemins ne sont pas préparés d’un point de vue neuromusculaire. En effet, savez-vous qu’il existe une communication cognitive avec les muscles et le cerveau ? Or, avec l’assistance électrique la communication neurologique est perturbée et la connexion neurosmusculaire est donc biaisée. Il y a une décorélation entre l’esprit et les muscles car les muscles n’ont presque pas d’information (ou en tout cas beaucoup moins) à transmettre au cerveau puisqu’ils sont significativement moins sollicités. Ce qui expliquerait ainsi bon nombre d’accidents en forêt avec les VTTAE.

Humeur : faut-il laisser rouler les VTT électriques en forêt ?
Une mauvaise rencontre avec un utilisateur qui a présumé de ses capacités à piloter un VTTAE trop puissant, et de plus de 20 kg.

Qu’est-ce que la connexion neuromusculaire ? La connexion neuromusculaire est tout simplement la connexion esprit-muscle ou Mind Muscle Connexion en anglais. Notre cerveau et nos muscles sont connectés. Si vous contractez les cuisses, les fessiers et les mollets, le cerveau doit d’abord envoyer des signaux via le système nerveux central au muscle correspondant. Ces impulsions provoquent une contraction et une réaction en lien avec ce qui est approprié de faire dans telle ou telle situation. Ainsi la qualité de la connexion entre votre esprit et votre muscle contrôle l’intensité de votre travail musculaire. Et l’inverse aussi. Sauf que là, c’est comme si il n’y avait plus d’émetteur. 

Dans le cas du VTTAE, l’effort est artificiel et la proprioception est donc significativement altérée.

En neurologie il existe ainsi une synchronisation entre le muscle, le cerveau et la proprioception. Une sorte de sensibilité profonde généralement inconsciente de la position des différentes parties du corps en fonction de l’information de départ. Elle fonctionne grâce à de nombreux récepteurs musculaires et ligamentaires et aux voies et centres nerveux impliqués. Sauf que dans le cas du VTTAE, l’effort est artificiel et la proprioception est donc significativement altérée. Les récepteurs sensoriels ne fonctionnent pas à la hauteur de la vitesse ou de la situation en cours face à un obstacle. C’est un souci kinesthésique qui empêche le réflexe normal qu’il y aurait eu si le muscle avait été sollicité normalement si nous avions pédalé à la force des jambes.

Enfin, la cohabitation VTT ou Gravel et VTTAE pose bien quelques problèmes sur les sentiers forestiers où le respect n’est pas toujours de rigueur car avoir de la puissance artificielle sous la pédale rend parfois inconsciemment incompétent et affaiblit les réflexes. Bref, noe vous y méprenez pas, et ne nous faites pas passer des bateaux à moteur pour des bateaux à voiles. Voilà, une forme de conclusion qui j’espère permettra une réflexion car il est important d’aller dans la bonne direction et ne pas réinventer la moto tout terrain. Ainsi, il est important de rouler dans un environnement propice à ce mode de transport, avec les équipements de sécurité adéquats, et de bénéficier d’une bonne visibilité et d’anticiper un temps de réaction adéquat pour éviter la mauvaise surprise.

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Jean-François Tatard

- 43 ans - Athlète multidisciplinaire, coach en vente et consultant sportif. Collaborateur à des sites spécialisés depuis 10 ans. Son histoire sportive commence quasiment aussi vite qu’il apprend à marcher. Le vélo et la course à pied sont vite devenus ses sujets de prédilection. Il y obtient des résultats de niveau national dans chacune de ces deux disciplines.

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