11 mai : votre plan de reprise

Si tout se passe comme prévu, le 11 mai marquera le début progressif du déconfinement tant attendu, et avec lui le retour des entrainements sur route en solitaire. Que ce soit après une coupure ou après deux mois d’entretien à la maison avec du home-trainer et de la PPG, la reprise se doit d’être progressive. Nous vous expliquons comment.

Par Guillaume Judas, avec la collaboration de Mathieu Istil – Photos : PEdALED

Dans le plan de déconfinement proposé la semaine dernière par le gouvernement, les sportifs vont pouvoir reprendre une activité presque normale, du moins pour les sorties à l’extérieur, et en solitaire. En effet, dans un premier temps, les rassemblements de plus de dix personnes resteront interdits, et pour le sport une distance d’au moins dix mètres est imposée. Autant dire que pour la pratique du vélo, cela revient à rouler seul car il n’y a absolument aucun intérêt à être accompagné en conservant une telle distanciation (aussi bien pour le partage des relais que pour discuter).

Vous allez pouvoir décrocher votre vélo et partir rouler pour parcourir la campagne.

Les Social Rides seront donc encore à conserver sur Zwift au moins jusqu’en juin, mais pour beaucoup la reprise des sorties sur la route va représenter une vraie bouffée d’oxygène. Tant mieux. Cependant, en l’absence d’objectifs précis et de dates d’événements ou de rassemblements – qui restent à déterminer – il ne va pas falloir faire n’importe quoi, au risque d’être épuisé moralement et physiquement à la fin de l’été.

D’abord le foncier

Au cours de ces huit semaines de confinement, les activités de substitution ont peut-être été suffisantes pour conserver une condition physique correcte et ne pas repartir à zéro. Mais s’il y a bien une chose qu’il n’est pas vraiment possible de travailler sur le home-trainer ou lors des séances limitées à une heure dans un rayon d’un kilomètre du domicile, c’est bien l’endurance pure. Le cyclisme et le triathlon sont d’abord des sports d’endurance, il convient de le rappeler. Si certains ont pu effectuer de longues séances sur home-trainer, l’environnement confiné et la position sur le vélo ne sont jamais totalement identiques à la réalité.

La bonne nouvelle, c’est que l’endurance est l’une des qualités les plus simples à travailler et à améliorer, si vous vous y prenez avec progressivité. Et pour certains d’entre vous, vous allez pour la première fois pouvoir réaliser un vrai premier mois d’endurance, sans la tentation des excès liés aux sorties en groupe.

Cette période va vous permettre de reprendre contact avec la route, de refaire les bases et d’installer un bon socle de condition pour la suite de cette saison perturbée. Il sera bien temps en juin de refaire des exercices spécifiques et plus intenses pour voir la forme s’améliorer nettement, mais sur des fondations solides. Ne l’oubliez pas, si la saison sportive reprend à partir du mois d’août, les dates des rendez-vous du calendrier risquent de se concentrer sur trois mois, avec un enchaînement de compétitions ou d’événements à l’instar de ce qui est pour l’instant prévu pour les professionnels. Durant ce trimestre intense, vous n’aurez plus le temps de souffler, et ce sera d’autant plus facile à enchainer que vous aurez bien pris le temps de vous accorder une bonne période de foncier.

La transition avec la pratique du home-trainer

Même si vous avez beaucoup roulé sur home-trainer, vous vous êtes en quelque sorte « désentrainé », car le geste du pédalage sur home-trainer est légèrement différent de celui que l’on retrouve sur la route, principalement parce qu’un tel appareil est fixe, mais aussi parce qu’il n’y ni les mêmes frottements, ni la même inertie. Les circuits proprioceptifs, qui sont les échanges d’information des muscles vers le système nerveux, sont un peu faussés par la stabilité d’un home-trainer.

Sur la route, il vous faudra un temps d’adaptation pour retrouver des réflexes performants d’équilibre et de pilotage du vélo en extérieur. Vous saurez évidement faire du vélo sans roulette, mais votre finesse de perception et de régulation de la maitrise de votre vélo sera très légèrement émoussée.

En termes de force, vous pourrez également constater un manque de réponse de vos muscles dans un premier temps. C’est assez logique, car même au sein de séances très difficiles sur le home-trainer, vous n’avez jamais les mêmes pics de puissance sur quelques secondes que sur la route.

Tout cela revient très vite, mais il est nécessaire d’avoir un organisme reposé pour reconnecter plus rapidement vos muscles et votre système nerveux. C’est pourquoi il est intéressant de lever le pied quelques jours avant la reprise de l’entrainement sur route.

Le bon moment pour vous interroger sur vos motivations

Ces longs moments de solitude sur la route vont aussi vous permettre de vous interroger sur votre pratique et sur vos réelles motivations à faire du vélo. Et pour beaucoup, de retrouver l’essence même du plaisir de rouler.

Pourquoi aimez-vous faire du vélo ? Que recherchez-vous dans cette pratique ? Qu’est-ce qui vous motive ? La sensation du vent sur le visage ou les mollets ? Le sentiment de liberté ? Le goût de l’effort ou le bien-être ressenti après la dépense physique ? La vie en groupe ? Une fois que vous aurez répondu à ces questions, concentrez-vous sur votre première motivation et sur le plaisir qu’elle vous procure pendant cette période de reprise, et oubliez tout le reste.

Pas de sorties en groupe, ni de pause café. Il va falloir attendre un peu pour retrouver cette convivialité.

L’intérêt d’une telle introspection est de mieux vous connaître vous-même et de mieux appréhender vos objectifs. Certains font du vélo par habitude, et parfois sans passion, seulement motivés par les sorties en groupe où ils profitent des roues pour gonfler leur moyenne. Ils sont spectateurs plus qu’acteurs de leur activité, et cela se ressent dans leur comportement en course ou sur des cyclosportives. Pour eux, les sorties en solitaire vont représenter un nouveau challenge, mais ils peuvent aussi y trouver une nouvelle forme de plaisir.

Une reprise progressive mais toujours ciblée

Ces sorties en solitaire seront forcément plus exigeantes que si elles étaient effectuées en groupe. Exigeantes pour le moral car certains découvriront ce qu’est le vent dans le nez durant de longs kilomètres, et par l’absence de contact social. Vous risquez dans un premier temps de trouver ces séances ennuyeuses. Exigeantes pour le physique, car en solitaire vous aurez peu de moments de roue libre. Vous serez « en prise », même si vous consacrez cette période à une allure foncière pure.

Il ne faudra donc pas compter en kilomètres, ni viser la moyenne. Ni même vous montrer trop ambitieux en termes de durée au début. Cette réadaptation progressive passera par des sorties fréquentes, car le foncier c’est aussi l’enchainement des sorties. Si vous pouvez rouler tous les jours ou presque, commencez par des sorties de deux heures, et programmez un jour de repos complet après trois sorties de suite. Si vous reprenez le travail et avez l’habitude de deux sorties longues par semaine, faites 2h30 le mercredi et le dimanche par exemple, et complétez par deux ou trois sorties d’une heure.

Une augmentation progressive de la charge d’entrainement devrait vous permettre de retrouver rapidement de bonnes sensations.

L’amélioration du niveau d’endurance se joue sur une durée de plus en plus longue, mais aussi sur l’amélioration du geste du pédalage, pour que celui-ci soit de plus en plus économique. Pour cela, alterner une sortie dont l’objectif est d’allonger progressivement la durée avec une ou des sorties courtes a l’avantage d’éviter l’accumulation de fatigue tout en laissant suffisamment de temps à l’organisme pour progresser. En termes de surcompensation, il est estimé qu’il faut environ 72 heures pour récupérer pleinement d’une sortie longue (à partir de 3h).

Vous pourrez ensuite augmenter progressivement la durée, mais en vous assurant de bien avoir assimilé les distances précédentes. Vous serez ainsi capable de rouler plus de 4h à la fin du mois de mai, en constatant que le simple enchainement des sorties et les difficultés naturelles du terrain vous auront permis de reprendre de la force, d’améliorer votre posture, de limiter les courbatures, de ne plus avoir de problèmes de selle ou d’optimiser votre hydratation et vos apports énergétiques. Vous éviterez les efforts « volontaires » mais vous pourrez progressivement monter les côtes de manière plus soutenue sans mettre de longues minutes à récupérer. Au niveau de l’intensité, ciblez une fourchette entre 60 et 75 % de votre potentiel, vérifiée par un cardiofréquencemètre.

Vous retrouverez vos habitudes en termes d’hydratation, comme de nombreux réflexes liés à une pratique régulière.

Dès la deuxième semaine, vous pouvez ajouter des exercices spécifiques, mais en restant à ce niveau de sollicitation cardiaque. Vous pouvez faire un peu de force sous maximale en montant les côtes à faible allure avec un gros braquet, ou alors faire des séquences de vélocité sur quelques minutes sur le plat, mais toujours en surveillant le cardio. Après la troisième semaine, vous pouvez effectuer trois ou quatre sprints courts au milieu de la sortie, histoire de finir de réveiller l’organisme.

Vous serez alors prêt à cibler votre entrainement avec des séances spécifiques au mois de juin, en visant le travail de la PMA, puis la FTP. Plus vous aurez été patient, progressif mais rigoureux pendant cette période de reprise, plus votre condition sera solide cet été. On parie ?

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Guillaume Judas

  - 53 ans - Journaliste professionnel depuis 1992 - Coach / Accompagnement de la performance - Ancien coureur Elite - Pratiques sportives actuelles : route & allroad (un peu). - Strava : Guillaume Judas

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