Comment gagner des watts

Par Guillaume Judas – Photos : PEdALED / Maratona Dles Dolomites / 3bikes.fr

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Entrainement ou optimisation du matériel ? Les deux sont essentiels pour être plus performant.

S’il est compliqué de déterminer quelle est la part de l’inné et la part de l’acquis dans le niveau d’un cycliste professionnel, on sait que l’une ne va pas sans l’autre. Parce que l’entraînement seul finit toujours par montrer des limites si les capacités physiques sont réduites, et parce que ce qu’on appelle le talent peut aussi être une capacité supérieure à la moyenne d’assimiler les charges de travail. Il est impossible de prédire la marge de progression d’un individu, entre ses débuts dans le cyclisme et le « sommet » de sa carrière. Trop de paramètres entrent en ligne de compte.

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L’une des erreurs de jugement des méthodes d’entraînement dites modernes basées uniquement sur les outils mis aujourd’hui à notre disposition est d’oublier les règles fondamentales de la pratique du cyclisme, qui est une discipline à 95% aérobie. Vouloir gagner de la puissance en travaillant uniquement à haute intensité conduit à la fois à la stagnation et au surentraînement dans la plupart des cas.

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Ce qui est ressenti comme un manque de puissance est tout simplement un manque de condition physique.

Rouler pour gagner des watts

Lorsqu’un cycliste modeste cherche à gagner de la puissance pour passer les côtes, il doit d’abord s’assurer que son entrainement foncier est suffisant. S’il arrive au pied d’une bosse déjà en sur-régime, il entre très vite en zone anaérobie, une intensité qui fait très mal aux jambes et coupe le souffle. D’où cette sensation de manque de puissance mais qui est en fait un simple manque de condition physique.

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Le foncier, c’est la base, et ça passe par la régularité et la fréquence des séances, effectuées à la bonne intensité, ni trop vite ni trop lentement, d’où l’intérêt de l’utilisation du capteur de puissance. Même si c’est indirectement, le véritable travail foncier fait aussi progresser le fameux VO2 Max, donc la puissance maximale aérobie, utile pour des efforts plus violents. C’est tout bénéfice.

Même si c’est indirectement, le véritable travail foncier fait aussi progresser le fameux VO2 Max.

Ensuite, si l’on comprend le principe que la puissance correspond au produit de la force appliquée sur les pédales par la vitesse à laquelle on les tourne, que l’efficacité du geste est prépondérante au rendement mécanique (seulement 25 % environ de la puissance produite par le corps humain est effectivement transmise aux pédales) il est nécessaire de faire des exercices de force, de vélocité et de coordination gestuelle. Cela n’augmente pas directement la cylindrée du moteur, mais sa productivité.

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Enfin, une fois toutes ces bases acquises, on améliore la puissance aérobie en travaillant plus spécifiquement dans une zone critique, juste en dessous du seuil anaérobie, de manière à repousser autant que possible cette zone d’équilibre où la quantité d’acide lactique produite par le travail musculaire pour fonctionner à haute intensité est recyclée. Plus ce seuil est élevé par rapport à VO2 Max, plus il est possible de rouler longtemps à haute intensité (comme pour un contre-la-montre ou la montée d’un col). Et plus ce seuil est élevé, moins les attaques ou les accélérations des concurrents ou des compagnons de route sont subies, ce qui permet de conserver des réserves pour faire la différence en fin d’épreuve ou de sortie quand les autres ont accumulé de la fatigue. Par exemple, pour un cycliste régulier, des séances spécifiques peuvent le faire progresser de 10 à 12 % en watts à ce seuil sur deux mois. Mais n’espérez pas progresser indéfiniment de la même manière. Il faut parfois plusieurs années pour gagner 1 ou 2 % sur sa meilleure condition physique. Et jusqu’à un plafond, qui marque vos limites physiques. C’est ce qui définit le niveau de chacun.

Pour un cycliste régulier, des séances spécifiques peuvent le faire progresser de 10 à 12 % en watts au seuil anaérobie sur deux mois.

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Le surpoids est un facteur limitant dans les montées.

S’alléger pour gagner des watts

On peut aussi économiser des watts à dépenser face aux forces de résistance. Le poids est l’ennemi du cycliste qui doit affronter la gravité. À puissance égale, moins on a de poids à porter, plus on s’élève rapidement face à la pente, ou avec une moindre fatigue. Il faut toutefois prendre en compte l’ensemble du poids à élever, et pas seulement celui du vélo. Cela inclut le cycliste et son équipement. Si on prend l’exemple d’un cycliste de 70 kg, avec un vélo de 8 kg et un équipement de 1,5 kg (chaussures, casque, vêtements, lunettes), un gain de poids de 1 kg sur le vélo ne lui fait économiser que 1,26 % de son poids total. Indépendamment du fait qu’un gain d’1 kg sur le poids du cycliste est aussi bénéfique sur la condition physique (ce qui n’est pas le cas lorsqu’on agit sur le matériel) s’alléger du même poids dans une pente de 8 % à 15 km/h permet d’effacer approximativement 4,5 watts de résistance. Soit un gain de 20 secondes pour 30 minutes de montée. C’est maigre, sauf en compétition où chaque seconde compte. Notons que le poids gagné a aussi un intérêt en termes de nervosité à chaque changement d’allure.

Une bonne position et un matériel aérodynamique permet d’économiser beaucoup de watts.

S’allonger pour gagner des watts

En quittant les pourcentages le poids revêt moins d’importance, car c’est alors contre les forces de résistance aérodynamique qu’il faut lutter. Et celles-ci sont proportionnelles au carré de la vitesse. 75 % de la résistance aérodynamique à 45 km/h provient du cycliste sur sa machine. En passant d’une position avec les mains en haut du cintre à la position mains aux cocottes, on économise une vingtaine de watts (selon le gabarit). En passant avec les mains en bas, c’est presque 40 watts supplémentaires. En position « chrono » avec un vélo adéquat, c’est encore 70 à 80 watts de plus ! Une quinzaine de watts peuvent encore être gagnés sur la tenue (combinaison et casque). Soit au final presque 150 watts de moins pour la même vitesse quand on met toutes les chances de son côté.

On peut économiser presque 150 watts pour la même vitesse quand on met toutes les chances de son côté.

Sans changer radicalement de discipline, un cadre de route aéro permet déjà d’économiser approximativement 25 watts par rapport à un cadre avec des tubes ronds. Avec des roues aérodynamiques, on est autour de 10 watts. Car pour être un routier complet, il faut rester dans le compromis. Et si la vitesse de 45 km/h effraie le cycliste modeste (c’est la référence aéro dans l’industrie du cycle et peut aussi être considérée quand le vent souffle fort et de face), il faut savoir que plus on passe de temps sur le vélo, plus le gain en temps (mais pas en watts) est important. C’est bien le poste primordial pour dépenser moins d’énergie, ou rouler plus vite avec la même puissance.

Pneus et transmission permettent d’agir sur les forces de résistance.

Vaincre les dernières résistances

Les frottements mécaniques représentent les dernières forces à vaincre. Comptez de 3 à 9 watts en remplaçant de mauvais roulements par le top du top, et de 5 à 15 watts au niveau des pneumatiques (modèle et pression de gonflage), et même jusqu’à 15 watts entre une transmission sale et mal entretenue et un ensemble fluide et bien huilé. Quant au gain de rendement pur de la rigidité d’un cadre et des roues, il n’a pas été réellement mesuré dans des conditions parfaitement identiques. Mais ce qui est certain, c’est que lorsque la condition physique commence à stagner ou à progresser au prix d’efforts fastidieux, le matériel a aussi son importance pour optimiser la performance.

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Guillaume Judas

  - 53 ans - Journaliste professionnel depuis 1992 - Coach / Accompagnement de la performance - Ancien coureur Elite - Pratiques sportives actuelles : route & allroad (un peu). - Strava : Guillaume Judas

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