Ça bouge du côté des transmissions, avec Campagnolo et Sram qui ajoutent un douzième pignon à la cassette, et Rotor qui va même jusqu’à 13 ! Mais si pour la marque italienne le pignon supplémentaire est l’occasion de combler un vide dans la gamme de développement actuelle, Sram et Rotor voient plutôt une manière de repenser le concept avec leur transmission. Voyons quels peuvent être les avantages et les inconvénients de passer à 12 ou 13 vitesses.
Par Guillaume Judas – Photos : Campagnolo / Sram / Rotor / Shimano / 3bikes / DR
Depuis 25 ans, Campagnolo a été le précurseur dans le domaine du pignon supplémentaire. Avec les cassettes à 8, 9, 10, 11 et maintenant 12 vitesses, la marque italienne a toujours été la première à innover, du moins dans le domaine du vélo de route. À lancer les hostilités en quelque sorte, car Shimano et Sram depuis le milieu des années 2000 (auparavant la marque américaine n’était présente que sur le VTT) ont bien été obligés de suivre. Et à chaque fois, Campa a commencé par balayer les interrogations liées à l’utilité d’un pignon supplémentaire, notamment en termes de fiabilité et de durabilité. Les changements de vitesse sont depuis toujours plus rapides grâce à l’espacement réduit entre les pignons, que ce soit avec des dérailleurs mécaniques (à câble) ou électroniques. Aujourd’hui, ce douzième pignon présenté il y a déjà un an et optimisé désormais avec les transmissions électroniques EPS permet à la marque italienne de ne proposer que deux cassettes différentes (11-29 et 11-32), avec les trois combinaisons de plateaux les plus classiques (53-39, 52-36 et 50-34), tout en comblant un trou important dans la gamme habituelle des développements, entre le pignon de 15 et celui de 17.
Grâce aux 12 vitesses, Campagnolo propose des cassettes dont les sept premiers pignons se suivent dent par dent. C’est en effet sur les plus petits pignons que chaque changement de vitesse est le plus sensible en termes de développement, et donc de changement de cadence de pédalage.
Une rupture de cadence de pédalageAvec 11 vitesses et une cassette avec une plage de développement élevée, le pignon de 16 est souvent le premier qui est oublié dans les gammes des fabricants. Or, on passe ainsi d’un rapport de 3,53 avec 53/15 à un rapport de 3,11 avec 53/17, soit une différence de 11 %. Plus haut sur la cassette, un saut entre le 39/23 et le 39/25 ne produit une différence que de 7 %. On se rend compte ainsi que plus le pignon est gros, moins il y a d’écart de développement entre les pignons, et il en est de même avec des plateaux plus petits. La fameuse cassette 11-28 montée sur la plupart des vélos de série, on trouve la suite de pignons suivante chez Shimano : 11-12-13-14-15-17-19-21-23-25-28 L’absence de pignon de 16 crée un « trou » dans la zone la plus utilisée sur le plat. Par exemple avec un grand plateau de 53 dents, en roulant à 38 km/h, il faut une cadence de 85 tours/minute avec le pignon de 15, et 96 tours/minutes avec le 17, alors que 91 tours/minutes suffiraient avec le 16. Des écarts importants difficiles à gérer en plein effort. Si l’écart de développement est moins important entre les pignons les plus grands, les cassettes les plus extrêmes (par exemple 11-32 ou 11-34) disposent obligatoirement de trous encore plus tôt dans la série de pignons, là où les écarts sont les plus importants. Avec un enchainement 11-12-13-14-16, la cassette 11-32 est encore plus casse-pattes. Quant à la 11-34 et son enchainement 11-13-15, elle est carrément inadaptée à une utilisation sportive. Un douzième pignon peut donc servir en priorité à combler l’un de ces écarts. |
Au final, la transmission Campagnolo 12 vitesses propose 15 combinaisons de développement différentes, en utilisant les deux plateaux et en évitant les braquets qui se chevauchent, là où une transmission 11 vitesses n’en propose que 14 dans le meilleur des cas.
Sram réinvente la gamme des braquets
Sram va encore plus loin en proposant sa nouvelle transmission Red eTap AXS 12 vitesses, avec des pignons et des plateaux plus petits. L’avantage est double : augmenter la plage de développement (écart entre le plus petit et le plus gros développement), tout en conservant un écart minimum entre les dents de la cassette. Le concept repose sur trois combinaisons de plateaux (50-37, 48-35, 46-33) avec à chaque fois seulement 13 dents d’écart, et trois cassettes (10-26, 10-28, 10-33), dont les deux premières ont les huit premiers pignons qui se suivent.
Si l’on prend par exemple 48-35 et 10-28 – une combinaison idéale pour un cyclosportif – on se retrouve avec plus de braquets différents disponibles (15 contre 14) que la classique 52-36 et 11-28 à 11 vitesses, et des développements extrêmes plus gros et plus petits, et même une plage de développement légèrement plus importante que celle proposée par Campagnolo.
Restent les questions légitimes quant au rendement mécanique des plus petits pignons. En effet, le site Friction Facts avait publié en 2015 une étude qui montrait la supériorité des combinaisons grand plateau – grand pignon par rapport aux combinaisons petit plateau – petit pignon, en termes de friction et à développement égal. Bien sûr, cela se joue à moins de 3 watts entre les deux extrêmes, et ce bénéficie peut être annihilé avec des croisements de chaîne trop importants.
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Mais compte tenu de l’écart déjà significatif entre un 11 et un 12 dents, il y a fort à parier que le 10 dents n’offre pas le meilleur rendement. Attendons donc de voir ce qu’il en est avec la nouvelle chaîne Sram pour le groupe Red eTap AXS. Notons également qu’une cassette avec un pignon de 10 dents impose un corps de cassette spécial, ce qui n’est pas le cas de la transmission Campagnolo.
Un moyen simple pour comparer les développementsPlutôt que de rechercher un tableau de correspondance des braquets qui tient compte de la taille de la roue et de celle du pneumatique, il suffit d’établir un rapport entre le nombre de dents du plateau et celui du pignon. Vous pouvez ainsi comparer les développements entre eux, avec un même vélo ou une même roue. Ainsi, le 50/10 de Sram (rapport de 5) est comparable à un 55/11 d’une transmission avec un départ 11, et donc plus gros qu’un 53/11 (rapport de 4,81). À l’autre extrémité de la cassette, le 37/26 de Sram (rapport de 1,42) est plus petit qu’un 39/27 (rapport de 1,44). Et dans tous les cas, un nombre de dents identique sur le plateau et la cassette donne toujours un rapport de 1 (34/34, 36/36 ou 42/42 par exemple), donc un développement équivalent. |
Le cas du mono plateau
Cette augmentation du nombre de pignons de la cassette et le nombre de braquets différents réellement disponibles permet de pousser l’évolution encore plus loin, en supprimant éventuellement un plateau sur le pédalier, à l’instar de ce qui se fait désormais en VTT, en cyclo-cross ou en gravel. Les changements de vitesse sont ainsi plus faciles à gérer, avec également une ligne de chaîne optimisée (le plateau unique étant recentré par rapport à l’ensemble de la cassette). On gagne du poids, de l’aérodynamisme et de la facilité de maintenance.
C’est un concept défendu par Sram avec les 12 vitesses du groupe Red eTap AXS (en option en mono plateau par exemple pour les vélos de contre-la-montre), ou encore par Rotor, qui lance carrément un groupe 13 vitesses, mais avec un seul plateau. Le groupe est annoncé comme le plus léger du marché, à moins de 1800 g. Il propose quatre choix de cassette (10-36, 10-39, 10-42 et 10-52) et un choix de plateau de 38 à 54 dents. Avec un plateau de 50 et une cassette 10-36, on se retrouve ainsi avec des extrêmes équivalents à 55/11 et 39/28, et donc 13 rapports différents (au lieu de 14 en 11 vitesses double, et 15 en 12 vitesses double).
On perd ici en revanche en termes de progressivité, avec seulement les six premiers pignons de la cassette qui se suivent dent par dent. À voir également comment le groupe gère les risques de sauts de chaîne, avec l’absence de dérailleur avant comme sécurité sur les routes avec un mauvais revêtement.
On sait qu’en 2018, l’équipe pro Aqua Blue avait fait le pari du début de saison avec le fameux vélo 3T Strada, et sa transmission Sram mono plateau Force 1x. Un concept défendu par Gérard Vroomen, l’inventeur du vélo, pour sa simplicité et son aérodynamisme. À l’usage cependant, les coureurs avaient rapidement touché les limites du système en compétition, avec des écarts trop importants entre les dentures, comme certains d’entre eux l’avaient révélé dans la presse. Mais il n’y avait encore que 11 vitesses. Nous sommes désormais à 12, voire 13.
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Ce qu’il faut savoir avant de passer aux 12 ou aux 13 vitesses
Dans tous les cas, le ou les pignons supplémentaires sur la cassette impliquent un changement complet de transmission, avec cassette, chaîne, dérailleurs, leviers et pédalier. Logique jusque là. Campagnolo permet d’adapter une cassette 12 sur un corps de cassette 11, puisqu’elle utilise le même espacement. Il est donc possible de conserver les mêmes roues, si celles-ci disposent d’un corps de cassette Campagnolo ED. Pour le Sram Red eTap AXS, le premier pignon de 10 dents impose le montage d’un corps de cassette spécifique XDR, disponible en option chez de nombreuses marques de roues. Là encore, il est donc possible d’utiliser les roues actuelles, mais juste avec cette modification. Rotor propose un changement d’univers en deux fois. En effet, la marque met sur le marché une cassette 12 vitesses avec un départ à 11 dents, pour être utilisée sur les corps de cassette actuels Shimano/Sram 11 vitesses, mais avec la transmission 1×13, qui devient du coup une 1×12. Pour vraiment bénéficier de la cassette à 13 vitesses, il faut ensuite passer par un moyeu ou des roues spécifiques, mais toujours avec la même chaîne. En attendant la réaction de Shimano, vous n’avez donc pas encore fini d’entendre parler des 12 ou 13 vitesses, que nous vous proposerons d’ailleurs rapidement en test prochainement sur 3bikes.fr.
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