Entrainement : l’importance de l’endurance

Par Guillaume Judas – Photos : Orbea/Mavic/Lapierre/Maratona dles Dolomites/3bikes.fr

Quel que soit le sport pratiqué, l’endurance fondamentale doit être à la base de toute préparation sérieuse. Pas moyen d’y couper pour espérer progresser – surtout en cyclisme et en triathlon – même si certaines méthodes dites modernes vous promettent des résultats miracles avec seulement quelques entrainements ciblés par semaine.

Pourquoi l’endurance ?

Le travail de l’endurance permet l’amélioration de plusieurs facteurs essentiels à une bonne condition physique et à toute progression ultérieure :

  • La capacité des poumons à apporter l’oxygène dont les muscles ont besoin pour transformer les réserves énergétiques en énergie mécanique. C’est par le sang que se fait cet échange.
  • La capacité du cÅ“ur à véhiculer ce sang en quantité suffisante vers les muscles.
  • La capacité des muscles à maintenir un effort donné dans la durée, grâce à une vascularisation plus importante.
  • Une plus grande proportion d’utilisation des graisses comme substrat énergétique par rapport aux sucres pour une allure donnée.
  • La capacité à résister à la fatigue et à rester motivé sur la durée.
  • Une récupération plus rapide après l’effort. Et donc plus de facilité pour enchainer plusieurs efforts.

Un bon niveau d’endurance optimise la capacité à utiliser au maximum l’oxygène disponible, car c’est cette capacité qui recule le seuil énergétique de fatigue. C’est de ce niveau d’endurance dont dépend le fameux seuil de production de l’acide lactique lorsque l’effort s’intensifie, ou plus exactement le moment où la production s’accélère au point de ne plus pouvoir être synthétisée par l’organisme. Tous les athlètes expérimentés connaissent ce fameux seuil, l’allure limite au-delà de laquelle quelques minutes suffisent pour « exploser », le souffle coupé, le réservoir à vide et les jambes tétanisées par les douleurs musculaires. On parle donc d’endurance pour des intensités qui s’étendent du rythme régulier mais suffisant pour produire un effet significatif sur la condition physique (en dessous, on parle plutôt de récupération active) jusqu’au rythme soutenu juste à la limite du seuil anaérobie dont nous parlons plus haut.

Néanmoins, avant de vouloir progresser au niveau de l’endurance haute, intéressons-nous déjà à l’endurance fondamentale, une intensité qui n’est pas toujours comprise et maîtrisée par les sportifs amateurs. En d’autres termes, avant de rouler vite, il faut déjà savoir rouler lentement. Mais pas trop non plus. Pour faire simple, la « bonne » allure d’endurance se situe autour de 70 % de la fréquence cardiaque maximale. C’est à cette intensité qu’il faut accumuler le maximum de temps à l’entrainement, mais aussi être capable de maintenir cette allure de plus en plus longtemps pour progresser en endurance.

Endurance et santé

Sans viser la performance, pratiquer une activité d’endurance présente un intérêt certain pour la santé. Tous les médecins s’accordent sur le fait que l’exercice physique régulier protège de l’hypertension et des surcharges en sucres et en graisses, des facteurs responsables de l’encrassement des artères et des maladies cardiovasculaires. Il aide à lutter contre certaines maladies, comme l’ostéoporose, le diabète de type 2 et certains cancers, tout en renforçant les défenses immunitaires. Le travail en endurance muscle le cœur en augmentant son volume et son efficacité. À chaque battement, un gros coeur envoie plus de sang pour assurer les besoins de l’organisme.

Un sportif endurant voit donc sa fréquence cardiaque diminuer pour un effort donné, mais aussi pour toutes les activités de la journée.

Un sportif endurant voit donc sa fréquence cardiaque diminuer pour un effort donné, mais aussi pour toutes les activités de la journée. La fréquence cardiaque au repos est autour de 70 battements par minute pour un sédentaire, quand elle peut descendre en dessous de 40 pulsations pour un athlète de haut niveau. L’endurance renforce également les facultés respiratoires et maintient la masse musculaire, ce qui s’avère essentiel à partir d’un certain âge. Pour un cycliste ou un triathlète régulier, ce qu’on appelle l’endurance fondamentale a aussi et surtout pour effet de permettre de perdre des graisses et d’entretenir l’affûtage. C’est une des raisons pour laquelle il est indispensable de maintenir des longues sorties tout au long de la saison.

L’endurance en cyclisme

L’amélioration du niveau d’endurance permet d’améliorer la capacité à maintenir plus longtemps un effort mais aussi à gagner en confort au cours des sorties. Certains voudraient « gagner de la puissance et avoir moins mal aux jambes dans les côtes« , alors qu’en réalité un meilleur niveau d’endurance leur permettrait d’aborder la difficulté avec déjà plus de réserve. Et donc plus de marge par rapport à leurs capacités maximales. Au cours d’une épreuve, l’endurance fait la différence entre deux cyclistes de niveau équivalent, car avec l’accumulation de la fatigue, le plus endurant voit ses capacités maximales diminuer moins vite que son adversaire. Le cyclisme sur route est un sport à forte dominante aérobie. C’est-à-dire que 95% du temps passé sur le vélo, même à haut niveau, s’effectue dans la zone entre l’endurance de base et le seuil anaérobie. Vous pouvez être très rapide au sprint par exemple, et donc disposer de grosses qualités d’explosivité, mais si vous ne terminez jamais une course ou n’êtes pas capable de suivre les meilleurs dans les difficultés du parcours, vous n’avez aucune chance de gagner.

Cependant, un cycliste super endurant n’a lui aussi aucune chance de gagner s’il ne peut pas changer de rythme et produire beaucoup de puissance sur quelques instants, pour suivre les attaques ou pour faire la différence. C’est donc bien toute la complexité d’une préparation bien menée, qui consiste à entrainer l’organisme à toutes sortes de sollicitations. Reste que les sorties d’entrainement dites d’endurance, celles qui consistent à aligner des kilomètres à un rythme à peu près régulier ont toujours été à la base de n’importe quelle préparation qui fonctionne. Et qu’elles ont parfois suffit à faire de bonnes saisons, en complément des compétitions. D’abord parce qu’à défaut de travailler d’autres qualités, celles-ci permettent déjà de se construire une condition physique correcte et solide. Ensuite parce que les parcours ne sont jamais totalement plats et sans vent. En réponse au terrain, le cycliste qui n’effectue que ce type de sortie est ainsi amené à produire des variations de puissance qui le font travailler sur une plage d’intensité plus large qu’il n’y paraît, et presque indépendamment de sa volonté. Ce qui ne serait pas le cas s’il n’effectuait par exemple que des efforts à une intensité ciblée, comme en course à pied par exemple. C’est à partir de cette base que l’on peut moderniser l’entrainement en y introduisant des séances d’intensité spécifiques, mais jamais en oubliant cette règle fondamentale.

L’endurance en triathlon

Selon le format de l’épreuve, la capacité a maintenir longtemps un rythme soutenu revêt plus ou moins d’importance, mais là encore l’endurance de base doit être le socle de toute préparation. Contrairement au cyclisme néanmoins, plus les distances s’allongent plus la proportion de la filière aérobie (dépendante en majeur partie de l’utilisation de l’oxygène) est importante avec 100 % de déterminant de la performance sur Half ou Ironman. Pourtant, la nécessité de progresser techniquement et de gagner en aisance le jour de l’épreuve en natation, vélo et course à pied incite à travailler à juste titre d’autres filières. C’est évidemment une bonne méthode pour progresser, mais à la condition là encore de rester mesuré sur la proportion. On ne progresse pas dans un sport d’endurance comme le triathlon en ne faisant QUE des séances courtes à haute intensité.

Risque de déséquilibre

À l’image des fondations d’une maison, l’entraînement foncier est destiné à assurer des bases solides à tout le reste de la saison. Mais aussi à une carrière. Grâce à ce travail en amont, la condition physique est ensuite plus stable, moins soumise aux coups de fatigue ou aux problèmes de récupération entre les principales épreuves. Le foncier bien fait augmente le potentiel de base du cycliste ou du triathlète, qui peut ensuite réaliser des séances spécifiques destinées à optimiser ses capacités en fonction d’un objectif précis. L’endurance est donc indispensable au sportif, quel que soit son sport de prédilection d’ailleurs. Sans endurance, ses capacités (de progression) sont limitées.

Combien sont-ils les pratiquants à se donner beaucoup de mal avec des séances courtes mais trop dures, mais qui ne progressent pas ?

Combien sont-ils les pratiquants à se donner beaucoup de mal avec des séances courtes mais trop dures, mais qui ne progressent pas ? Avec de nouveaux outils comme les home-trainers et capteurs de puissance, ou encore les connexions avec d’autres disciplines comme la course à pied, il est tentant de vouloir optimiser le temps passé à l’entrainement en ne ciblant que des intensités précises, et notamment celles qui sont censées améliorer les capacités maximales.

Mais il est impossible d’espérer un haut rendement avec un travail à haut régime si les fondations ne sont pas solides. Par exemple, le développement des qualités anaérobie ne sert à rien à ceux qui ne gonflent pas leurs qualités aérobie au préalable. Sans travail foncier, le fameux « seuil » anaérobie est bas en puissance et en fréquence cardiaque, et on se retrouve vite dans le rouge avec l’impossibilité de renouveler des efforts à cause de l’accumulation de l’acide lactique. Pour un athlète de haut niveau, on estime à 80 % le temps d’entrainement à passer dans la zone d’endurance fondamentale. Parce que cette zone privilégiée est aussi idéale aussi bien pour l’échauffement que pour une récupération active entre les compétitions ou les séances difficiles. Elle permet en effet d’accélérer l’élimination des déchets dus à l’accumulation de l’acide lactique dans les muscles.

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Endurance mode d’emploi

Si l’endurance est la base de la préparation physique à vélo ou en triathlon, il est toutefois évident qu’on ne peut se contenter d’un seul type d’intensité pour progresser. S’il est indispensable de conserver un bon niveau d’endurance tout au long de la saison, il n’est pas inutile non plus d’intégrer quelques variations d’allure pendant la période hivernale ou lors de toute période de reprise. La règle est de s’imposer régularité et progressivité dans l’entraînement. Cela vaut aussi pour l’endurance. En dehors des périodes de compétition, une voire deux séances par semaine dédiées au travail de l’endurance sont nécessaires, si possible à distance l’une de l’autre et en augmentant progressivement leur durée, en rapport avec l’objectif visé. On ne se lance pas dans une sortie de 6 heures en janvier si on prépare l’Étape du Tour en juillet, mais c’est à envisager à quelques semaines de l’objectif, afin d’être préparé physiquement et mentalement le jour J. En période de compétition, à moins d’une extrême fatigue ressentie entre deux épreuves, une sortie longue par semaine doit être maintenue. En complément, des sorties courtes peuvent être réservées à un travail physique et/ou technique, afin de développer d’autres qualités utiles à la performance. Les triathlètes quant à eux ont bien sûr tout avantage à travailler leur endurance d’abord sur le vélo, afin de limiter les risques de blessures en course à pied par exemple.

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Bénéfices tangibles

Pour ceux qui douteraient encore de la nécessité de consacrer du temps à l’endurance fondamentale, rappelons les bénéfices qu’elle peut apporter au cycliste amateur ou occasionnel. Semaine après semaine, le coureur est de plus en plus à l’aise sur sa machine. Les côtes, les descentes ou la position mains en bas du guidon lui pèsent moins. Le souffle est plus régulier, et surtout bien contrôlé. La masse grasse diminue progressivement, il se sent moins engoncé dans ses vêtements, beaucoup plus tonique aussi. Mais le signe le plus tangible concerne la fréquence cardiaque. Au repos, elle est plus régulière et surtout plus basse. Les lendemains d’entraînement, la fatigue n’est plus que légère et superficielle. Après un effort de moyenne intensité, le cœur redescend plus vite. Et lors d’un entraînement, sur les parcours habituels, la fréquence cardiaque est plus basse, il se sent moins essoufflé pour l’allure qui était adoptée en début de période. De bonnes raisons pour éviter de brûler les étapes, non ?

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Guillaume Judas

  - 53 ans - Journaliste professionnel depuis 1992 - Coach / Accompagnement de la performance - Ancien coureur Elite - Pratiques sportives actuelles : route & allroad (un peu). - Strava : Guillaume Judas

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