Col du Galibier : entrez dans la légende

Du premier franchissement par Emile Georget en 1911,
à son 61epassage cette année sur le Tour, le Galibier a forgé
sa légende
dans le monde du vélo pendant plus d’un siècle.
Du haut de ses 2 642 m, le col à cheval entre la Savoie
et les Hautes-Alpes est un monument à épingler.

Texte et photos : Sylvain Pigeau.

 

Monter le Galibier, c’est prendre une route chargée d’histoire et gravir l’une des légendes du sport cycliste. On a tendance à promettre aux débutants que l’intronisation pour devenir coureur passe par le franchissement d’un col de plus
de 2 000 m. C’est un peu le « premier 8 000 », l’amputation des orteils en moins, mais les engelures aux doigts parfois. Franchir le cinquième plus haut col routier des Alpes, c’est entrer dans une caste. Mais le dompter, c’est impossible. Quoi qu’il arrive, vous ne pourrez jamais prétendre avoir vaincu le Galibier et être passé
« bien, à votre main ». Si tel était le cas, vous lui auriez alors manqué de respect.
Le Télégraphe, Plan Lachat, le tunnel, Henri Desgranges ou Marco Pantani. Ces noms raisonnent autant contre les parois du Grand Galibier, que les inscriptions
sur la route donnent à ce monument la dimension d’une fresque alpestre. Braquet montagnard obligatoire, coupe vent dans la poche, on vous embarque.

« Ô Sappey, ô Laffrey, ô col Bayard, ô Tourmalet ! …
A côté du Galibier, vous êtes de la pâle et vulgaire bibine »

Henri Desgrange

VERSANT NORD

Depuis Saint-Michel de Maurienne, l’ascension débute par le col du Télégraphe. Une montée de 13 km à 7 % de moyenne. Ce « hors d’œuvre » ne doit pas être pris à la légère sur le temps total de montée car il en représente près de la moitié. Les cinq premiers kilomètres sont les plus difficiles en termes de pente et le pourcentage maximum peut atteindre les 11 %. Suit un passage plus calme dans
la forêt et enfin trois derniers kilomètres, au niveau de l’intersection avec la route
de Valmeinier, vraiment très faciles. Il est alors possible de remettre du braquet.

Au sommet du col, vous pouvez admirer la vallée de la Maurienne et, par temps dégagé, tenter d’apercevoir les alentours de Modane. En basculant, il est possible d’observer les Karellis et Montricher Albanne sur l’autre versant, puis au bout d’un kilomètre de descente, la station village de Valloire.

Il est possible d’effectuer un ravitaillement à la fontaine dans la traversée du village. En cas de forte chaleur, c’est même conseillé. À la sortie de Valloire, après avoir franchi le pont sur la Valloirette, l’ascension finale débute. D’abord par une rampe longue de 2 km à 10 %, vous menant aux Verneys. Les 6 km suivants ne sont pas des plus compliqués mais imposent une gestion rigoureuse pour envisager correctement la suite. En effet, au niveau du hameau de Bonnenuit (aérodrome), la pente avoisine les 6 ou 7 % et il ne faut pas se laisser piéger.

Les paysages eux, sont somptueux. On entre dans les grandes étendues alpestres et l’impression de grandeur est à couper le souffle. Elle vous accompagnera jusqu’au sommet.

À Plan Lachat, sur votre gauche, une route militaire part en direction du col et du camp des Rochilles. Mais devant vous, après un bref moment d’accalmie, se dresse la dernière partie de l’ascension de votre monument du jour. 8 km à près de 8 % de moyenne, dont les 2 premiers sont à 10 %. Ajouté à cela, la barre des 2 000 m d’altitude est tout juste franchie et les sensations l’accompagnant sont présentes.

Au fil des kilomètres, les inscriptions sur la route vous permettent d’imaginer l’ambiance lors du passage du Tour de France et, en fonction de l’horaire, vous aurez peut-être la chance de croiser quelques marmottes. À la fin de ces 2 km, vous atteignez le premier emplacement de la stèle de Marco Pantani (lire ci-après) et apercevez face à vous la dernière partie avec, au loin, le tunnel et le col. C’est sans doute le moment le plus difficile psychologiquement. Tous les résultats de votre bonne gestion se feront alors sentir à cet instant. Si tel n’était pas le cas, les ennuis commenceraient.

 

Un dernier kilomètre terrible

La pente dépasse rarement les 8 % jusqu’au tunnel. Il existe même des moments pour souffler. Le dernier kilomètre est terrible. 100 m de dénivelé en 1 km soit 10 % de moyenne. Dans un dernier effort vous passez la dernière épingle et apercevez enfin le sommet, auquel vous accédez via une dernière petite ligne droite. La délivrance après presque 40 km d’ascension et une vue imprenable sur le début du massif des Ecrins et Briançon, au sud, le Mont Thabord et par temps clair le Mont Blanc, au nord. Une juste récompense.

 

VERSANT SUD-EST

Côté sud, il faut comptabiliser l’ascension du col du Lautaret, selon votre arrivée
de Briançon ou de Bourg d’Oisans. Dans les deux cas, c’est plus de 30 km de montée, mais avec des moyennes d’environ 4 % de pente et des ruptures rarement supérieures à 6 %.

Le Lautaret présente un attrait touristique certain car il est le seul col français
de plus de 2 000 m ouvert, quasiment, toute l’année
. La beauté du paysage
et la vue sur les glaciers de la Meije font le reste.

Sur ce versant, la montée est beaucoup plus tranquille. Sur le Tour de France, les pros passent même généralement sur le grand plateau. La pente atteint rarement les 8 %, sauf pour le dernier kilomètre, qui comme son homologue au nord, permet de gagner 100 m d’altitude. Là encore, vous effectuez la dernière partie dans un ultime coup de rein. Avant d’aborder ce dernier rush, vous pouvez faire une halte au célèbre monument consacré à Henri Desgranges, fondateur du Tour de France. Photo obligatoire à moins que vous ne soyez focalisé sur votre performance.

En vacation à Valloire, nous vous conseillons donc de partir en direction de Saint-Michel de Maurienne, puis de grimper le Galibier en totalité par le Nord. De basculer, faire demi tour au Lautaret et de revenir, ainsi, vous prendrez toute la dimension de ce géant alpin.

Un peu d’histoire

Placée sur la Route des Grandes Alpes, la route du col du Galibier a été construite
à partir de 1880 et achevée par le percement du tunnel en 1891 (à 2 542 m). Dès lors le passage au col ne s’effectuait que par ce biais. En 1976, en raison de la vétusté du tunnel, ce dernier à été fermé et la dernière partie menant au col construite. Le tunnel a été rénové et ré-ouvert en 2002. Le Tour de France y est d’ailleurs passé. Mais en temps normal, il est interdit aux cyclistes.

Le tracé a aussi subit des modifications sur les deux versants. Côté Valloire, au nord, la rampe de Plan Lachat (avec des passages à 14 %) a été adoucie par la construction de plusieurs lacets au niveau du hameau de Bonnenuit. Ce dernier est contourné, entre la rivière et l’aérodrome.

Sur l’autre versant, on peut encore apercevoir le tracé de l’ancienne route, qui démarrait au niveau des tunnels environ 3 km avant le col du Lautaret (depuis Briançon). L’ascension était longue d’environ 6 km, sur une route non goudronnée
et avec une moyenne d’environ 10 % de pente.

Photo : https://www.geneanet.org

Marco Pantani, le pirate vit toujours

Un jour de juillet 1998, sous des trombes d’eau, Marco Pantani dépose littéralement Jan Ullrich et ses adversaires sur les hauteurs de Plan Lachat.
Le grimpeur italien file alors vers on premier, et unique, succès sur le Tour de France, après une chevauchée solitaire jusqu’aux Deux Alpes. À la suite de sa mort tragique en 2004, une stèle a été érigée à l’endroit même de son attaque décisive. Après des dégradations, cette dernière a été déplacée un kilomètre plus haut, non loin de la ferme.

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