Test du Pinarello Dogma F10 Disk

Lancé il y a moins de deux ans, le Pinarello Dogma F10 est déjà une icône, aidé en cela par le prestige de la marque, mais aussi par les succès de l’équipe Sky de Chris Froome et Geraint Thomas. Pour suivre la tendance, il devait être inévitablement proposé dans une version à freins à disque. Voyons si elle vaut la première variante de ce vélo très haut de gamme, qui allie performance et polyvalence sur tous les terrains.

Par Guillaume Judas – Photos : 3Bikes.fr

Sans se montrer particulièrement spectaculaire par rapport à certains concurrents, le Dogma F10 s’est d’emblée imposé comme une référence parmi les vélos de haut de gamme. D’abord parce que des tests indépendants en soufflerie ont montré qu’il était l’un des plus performants du marché dans le domaine au moment de sa présentation début 2017, mais aussi parce qu’il n’est pas exclusif, dans le sens où les coureurs de l’équipe Sky l’utilisent sur tous les terrains, de la plaine aux montées abruptes des cols des Dolomites, en passant par les pavés flandriens. De là à estimer qu’il peut convenir sur presque tous les terrains à n’importe quel pratiquant un peu sportif, il n’y a qu’un pas.

Si la marque est restée fidèle à certains choix techniques simples, tels que le cheminement des câbles de freins, la compatibilité avec les transmission mécaniques ou électroniques, ou encore les roulements de pédalier externes, elle a optimisé son savoir-faire dans plusieurs domaines : l’utilisation de fibres de carbone Torayca T1100 extrêmement légères et rigides, la conception asymétrique du cadre pour répondre aux sollicitations supérieures du côté droit du cadre (côté transmission), des tubes à la forme profilée FlatBack avec un tube diagonal hérité du Bolide TT qui englobe les flux d’air autour des deux bidons, et deux appendices nommés ForkFlap en bas de la fourche pour annuler l’impact de la traînée aérodynamique du levier de serrage de roue.

S’il n’est pas tout à fait le plus léger du marché (820 g sans peinture), le cadre est très rigide, et surtout proposé en 13 tailles, ce qui est pratiquement unique sur le marché. Et surtout, il conserve un comportement adapté aux vitesses élevées, avec une stabilité à toute épreuve. Bref, un must have on vous dit ! Même s’il n’en est pas un fervent défenseur, Fausto Pinarello se devait pourtant de proposer une version à freins à disque, ne serait-ce que pour suivre la tendance du marché.

Il était ainsi intéressant pour nous de tester cette dernière mouture, en comparaison avec le Dogma F10 que nous connaissons très bien pour avoir parcouru 25 000 km à son guidon.

Une adaptation

Contrairement à d’autres vélos récents construits autour du concept de freinage (voir : test du Specialized Venge), le F10 Disk est une adaptation du F10 à patins. Pour preuve, il ne bénéficie pas d’un cheminement totalement interne des durites de frein, ce qui serait pourtant plus facilement réalisable avec le système hydraulique plutôt qu’avec des câbles d’ailleurs.

S’il est bien renforcé au niveau de la fourche et des bases, avec notamment l’adoption d’un système de serrage par axe traversant de 12 mm, et qu’il passe à un entraxe arrière de 142 mm pour pouvoir y loger la transmission et le disque, il conserve toutes les caractéristiques du F10 à patins.

À commencer par la géométrie, identique ici, sauf qu’il n’y a plus que 11 tailles au lieu de 13. Pas de bases plus longues ou d’empattement supérieur donc, et une compatibilité de pneu qui reste à 25 mm au lieu de 28 ou 32 mm pour certains modèles concurrents. Une simple adaptation du modèle qui montre une orientation toujours résolument sportive.

Pour contrecarrer la puissance supérieure du freinage, surtout avec des disques de 160 mm ici, Pinarello mise sur la qualité des gommes plutôt que sur leur section. Notons toutefois qu’avec des jantes larges de 27 mm, les pneus de 25 mesurent en réalité 28 mm. Et c’est plutôt bien vu avec des pneus Pirelli PZero 4S, à l’excellente tenue de route même et surtout sous l’humidité.

Le montage est bien entendu haut de gamme, avec un groupe complet Shimano Dura Ace Di2 Disc R9170, avec sa transmission électronique et des disques de 160 (des 140 auraient sans doute été suffisants sur un petit cadre comme ici), et des roues Mavic Cosmic Pro Carbon UST dont les jantes font 45 mm de hauteur.

Ça tombe plutôt bien, car le montage est comparable au F10 de 2017 dont nous disposons, avec un groupe Dura Ace Di2 à patins et des Mavic Cosmic Pro Carbon SL (40 mm).

Le poids

Le verdict de la balance est sans appel. Poids de la version Disk (complet) : 7,850 kg. Poids de la version non disque : 7 kg tout rond. Mais il convient de préciser que certains éléments ne sont pas tout à fait du même niveau de gamme. Les roues Cosmic Pro Carbon Disc sont d’abord 150 g plus lourdes que les Cosmic Pro Carbon SL. Ensuite, il y a 130 g de différence sur le poste de pilotage, 20 g sur les pédales et 25 g sur les porte-bidons.

Au final, le réel surpoids s’élève à 500 g, dont 340 pour le seul groupe avec le freinage à disque. Une différence qui peut influer sur les sensations dans certaines conditions (pentes raides ou relances). Néanmoins, c’est quasi imperceptible sur nos parcours habituels en vallée de Chevreuse.

L’aéro

Si les disques peuvent parfois se révéler plus performants dans ce domaine pour certains vélos en épurant le poste de pilotage (avec des passages internes) et la tête de fourche, ce n’est pas le cas ici. Puisque le F10 Disk est « adapté » du F10, il perd théoriquement de 2 à 4 watts à 45 km/h avec la proéminence du disque avant surtout, et ceci n’est ni rattrapé par les passages de gaines, ni par le ForkFlap en bas de la fourche.

Là encore c’est imperceptible sur la route en termes de sensations. Cependant, ces broutilles cumulées avec celles du poids peuvent expliquer que de nombreux pros rechignent encore à adopter cette technologie, pour une question de performance pure.

Le confort

Le Dogma F10 n’est pas tout à fait un modèle de confort longitudinal. Oubliez-le pour les longues distances à l’allure d’un cyclotouriste. Plutôt compact dans ses réactions, le F10 Disk est très proche du modèle à patins. Nous apprécions grandement en revanche le confort et le plaisir apporté par le groupe, au niveau de la transmission mais aussi de la forme des leviers de freins, presque identiques à la version non disque.

Une vraie performance de la part de Shimano. La qualité du freinage fait aussi partie du confort. Elle est ici à souligner.

Le freinage

Si les étriers Shimano Dura Ace sont réputés comme très puissants, et largement suffisants pour beaucoup d’entre nous, ils ne soutiennent absolument pas la comparaison avec la version disque. C’est ici remarquable en passant d’un vélo à l’autre, où l’étrier arrière semble juste ralentir le vélo quand le disque rassure et offre de nouvelles références dans le domaine. Reste que le rotor de 160 mm est un peu surdimensionné pour notre poids et notre pratique, et que la roue arrière bloque très vite en cas de freinage d’urgence. D’après Shimano d’ailleurs, un montage en 140 mm offre des performances de freinage très proches des étriers classiques, pour ne pas perturber les utilisateurs. Pas sûr de notre point de vue que la solution soit toutefois la meilleure, puisque nous avons vu en montagne des disques de 140 chauffer et se voiler rapidement après de longues sollicitations. Bien que très (trop) puissant, le 160 est plus adapté de ce point de vue-là.

Le F10 Disk, bien que sans géométrie spécifique, se montre en tout cas tout à fait à la hauteur de la technologie, rassurant et stable au freinage, quelles que soient les circonstances.

La rigidité

Nous l’avions déjà remarqué avec le Specialized Venge S-Works, mais c’est ici un peu plus net en comparant les versions disque et patins : les axes traversant apportent un très léger avantage en termes de rigidité latérale, grâce à une liaison plus efficace entre le cadre et les roues. Suffisante pour contrecarrer le léger surpoids du vélo à disque sur des parcours moyennement vallonnés ? Oui, c’est fort probable. Mais ce qu’il faut retenir surtout, c’est que ce F10 Disk n’est pas fondamentalement différent du Dogma F10 original en termes de comportement. Il est rigide, dynamique et parfaitement posé sur ses deux roues. Il bénéficie des qualités de roulement reconnues de la marque, qui lui donnent une inertie positive quand la machine est lancée, mais il reste très compact dans ses réactions lors des changements de rythme. Une vraie formule 1 !

« Rigide, dynamique et parfaitement posé sur ses deux roues, le Dogma F10 Disk bénéficie des qualités de roulement reconnues de la marque. »

Le bémol

Impossible de passer à côté cependant des bruits de frottement des disques contre les plaquettes de frein. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir recherché le réglage adéquat. Pas vraiment gênant en ce qui concerne le rendement, ou même toutes les autres qualités du vélo. Mais ça frotte en danseuse sur la roue avant, avec un petit bruit métallique qui pourrait rapidement agacer les puristes. Les freins se manifestent également en passant sur des routes souillées, avec un bruit de sable sur les deux étriers cette fois-ci. Heureusement, les disques de 160 mm Shimano sont moins sensibles à la surchauffe que les 140, et ainsi beaucoup moins bruyants lors des freinages appuyés.

Le prix

Si l’on s’en tient au prix catalogue, une petite gymnastique est nécessaire pour comparer les deux vélos. Le F10 est proposé à 10800 €, mais avec des roues Mavic Cosmic Pro Carbon SL, alors que le F10 Disk est à 10500 € avec les Cosmic Pro Carbon, tout le reste de l’équipement étant égal par ailleurs (sauf disques vs. patins). Or les SL sont vendues 600 € plus chères. On peut donc en conclure que le F10 Disk est 300 € plus cher que le F10 à patins.

Verdict

Le Pinarello Dogma F10 Disk conserve la plupart de ses qualités en passant au freinage à disque, en demeurant toujours aussi performant sur la plupart des terrains. Un peu plus lourd et un poil moins aéro, il semble aussi très légèrement plus rigide. Mais on retrouve nos marques facilement au guidon des deux machines. Le passage au disque est toutefois ici moins enthousiasmant que sur certaines machines concurrentes, du fait de l’absence d’intégration des durites au niveau du poste de pilotage.

PINARELLO DOGMA F10 DISK
NOTE : ***** 

LES + : comportement et caractère préservés par rapport au F10 à patins (très haut de gamme), géométrie sportive, polyvalence, nombre de tailles, nombre de coloris
LES – : bruit des disques, prix

CADRE : Dogma F10 Disk carbone Toyayca T1100 1K, technologie nanoalliage
FOURCHE : Onda F10
ROUES : Mavic Cosmic Pro Carbon SL UST Disc
PNEUMATIQUES : Pirelli PZero 4S 700×25
PÉDALIER : Shimano Dura-Ace 9100 50/34
CASSETTE :
Shimano Dura-Ace 11/28
DÉRAILLEUR ARRIÈRE : Shimano Dura-Ace 9150 Di2
FREINS : Shimano Dura-Ace R9170 hydrauliques, montage Flat Mount, Rotors 160 mm
LEVIERS : Shimano Dura-Ace 9170 Di2 Disc
CINTRE : Most Jaguar XA Aero (combo Most Talon sur la version de série)
POTENCE : Most Tiger alu Aero
TIGE DE SELLE : Dogma F10
SELLE : Most Eight by Selle Italia
NOMBRE DE TAILLES : 11
POIDS : 7,520 kg en taille 46,5 sans pédales

PRIX : 10800 € pour la version de série avec combo Most Talon

CONTACT : pinarello.com

-> VOIR AUSSI : Nos autres tests matos

Guillaume Judas

  - 53 ans - Journaliste professionnel depuis 1992 - Coach / Accompagnement de la performance - Ancien coureur Elite - Pratiques sportives actuelles : route & allroad (un peu). - Strava : Guillaume Judas

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